On distingue tout d’abord
deux
censures auxquelles s’est retrouvé soumis le cinéma, de chaque côté de
la ligne
de démarcation. C'est deux censures ont généralement agis pour des
motifs différents.
"J'ai
donné des directives très claires pour que les Français ne produisent
que des
films légers, vides, et si possible, stupides. Je pense qu'ils s'en
contenteront."
La deuxième censure est celle du gouvernement de Vichy,
active jusqu'en 1942. Pour lui, le cinéma est une activité commerciale
et
industrielle prioritaire. Il instaure, tout comme les Allemands, une
triple
censure. Les films doivent y passer à la présentation du scénario,
après le
tournage et en cas d'exportation du film à l'étranger. Mais les films
français
réalisés par la société de production allemande Continental ne
passaient pas
devant la censure de Vichy. En effet, les Allemands la considéraient "bornée et conservatrice", ce qui fait qu'ils
s'en
moquaient.
Le COIC a pour but de regrouper les professionnels
du cinéma.
Pour cela, il délivre des cartes d'identités professionnelles. Mais le
COIC est
lié à des règles très strictes. Tout d'abord, l'obtention d'une carte
est
difficile et elle est interdite notamment aux juifs, aux communistes et
aux
homosexuels. De plus, chaque professionnel désirant obtenir une carte
doit
avoir un casier judiciaire vierge. Ensuite, la carte doit être
renouvelée tous
les trois mois. Elle est cependant indispensable à toute personne
travaillant
dans le cinéma car elle est obligatoire pour rentrer dans un studio.
La censure s'est
très vite mise en
place au début de l'occupation, procédant étape par étape. D'abord, les
censures française et allemande ont retiré la moitié des films déjà
existants,
ceux-ci jugés tendancieux (films qui, par exemple, expriment un peu
trop leurs
opinons politiques), immoraux (avec des scènes de nu, par exemple), ainsi que les films de guerre. Ensuite,
les
Allemands interdisent tous les films français réalisés avant 1937, soit
40% des
films restants. Après cela, ce sont les noms des acteurs juifs qui sont
censurés, en étant retirés des génériques et des affiches. C'est
ensuite au
tour des films anglo-saxons, qui sont interdits dès 1940 en zone
occupée, puis
en 1942 en zone sud.
En
1941, Goebbels crée la société
de
production cinématographique Continental Films, surnommée La
Continental, et choisit pour la diriger Alfred Greven (réalisateur,
travaillant autrefois pour la UFA en Allemagne). Cette compagnie
allemande,
installée en
zone occupée, produit des films réalisés et interprétés par des
Français. Le
logo de la Continental, représentant son initiale, devient pendant 4
ans la
croix gammée du cinéma ; c'est-à-dire le symbole de la présence
allemande en
France. Mais Greven veut faire du cinéma "à la française" sans forme
de propagande. Ses choix l'opposent donc à Goebbels, mais il bénéficie
de la
protection de son ami Goering.
Logo de la Continental |
Mais, la Continental n'est pas seule dans
l'industrie
cinématographique française : Gaumont et Pathé sont également présents.
Cependant, elle obtient des avantages considérables sur ses
concurrents. En
effet, elle dispose tout d'abord d'importants moyens financiers.
Ensuite, presque
tous les tournages de films français ont été stoppés lors du début de
la
guerre. Et en 1941, la Continental est la première compagnie qui
obtient
l'autorisation de recommencer à tourner ; ses films sortent donc en salle
avec
plusieurs semaines d'avance que les autres sociétés de production.
Enfin, la
Continental est une société à concentration verticale. Elle dispose
ainsi de
toute la chaine de fabrication d'un film. De plus, la Continental étant
au
service des Allemands, elle dispose de moyens de persuasion
conséquents. Les
réalisateurs français ne refusent donc généralement pas de travailler
avec
elle. Mais même s'ils se soumettent à elle, les réalisateurs restent
libres
dans le choix de leurs scénarii (tant qu'ils ne font pas d'allusion
aux thèmes
interdits par la censure, comme la guerre). Ils refusent également de
participer à toute forme de propagande.
Au total, sur les 220 films réalisés pendant l'occupation, 30 ont été produits par la Continental, dont notamment Premier rendez-vous, Mam'zelle Bonaparte, Les Inconnus dans la maison, L'Assassin habite au 21, La Main du diable, Le Corbeau… Mais en dépit des apparences, ce chiffre est largement supérieur à celui des 56 autres producteurs. La deuxième société à avoir produit le plus de film est Pathé, avec un total de 14 films. Vient ensuite Gaumont, avec 8 films. Les autres ne dépassent pas les 7 films produits sur cette période de 4 ans.
Salle de cinéma du Gaumont-Palace en 1943 |
Mais la censure ne s'arrête pas à
la
production d'un film. En effet, les réactions des spectateurs dans les
salles
de cinéma sont limitées, en particulier pendant la diffusion des
actualités,
projetées avant chaque film. Des affiches placardées dans les salles et
des
messages projetés avant le lancement du film étaient là pour le
rappeler.
Ainsi, les coups de sifflets, les rires, les toux prolongées, les
murmures ou
encore les piétinements pouvait couter l'expulsion de la salle, des
poursuites
et même un séjour au commissariat.
PROJECTION
DES ACTUALITES |
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Le
public est informé qu'aucune manifestation ne sera tolérée pendant la
projection des actualités. |
Le
moindre murmure ou rire, ainsi que les
applaudissements peuvent entrainer des ARRESTATIONS et la FERMETURE
IMMEDIATE des salles. |
LA DIRECTION |
Texte des affiches placardées dans les
salles de cinéma |
Schéma récapitulatif de l'organisation cinématographique entre 1940 et 1944 |
ACE = Alliance Cinématographique Européenne
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